À travers certaines tournures de phrases, assez machinalement,
J’ai pu camoufler des faits, des choses, à des amis, parents,
Rien d’grave, quelques frasques, à mon avis sans importance,
Des pensées passées sous silence pour éviter d’trop faire de vagues
Inutiles. J’étais sincère, croyant bien faire et au final...
J’regrette qu’ensuite, ces escamotages anecdotiques
Aient pris avec le temps des proportions phénoménales.
J’pensais pas qu’ils allaient grossir, comment savoir à quel point ils
S’empileraient, faisant comme si j’avais menti, à dire vrai,
Si j’avais soupçonné ce genre de réactions à mon égard,
Si j’avais pu prévoir qu’ils érigeraient de telles barrières,
J’aurais gardé pour moi bien moins d’secrets, bien moins d’histoires.
J’aurais moins calculé, moins cherché à contrôler
Sous couvert de préserver la paix, le soi-disant calme ambiant.
L’équilibre supposé, en fait si faussé.
J’aurais laissé d’la place aux plaies, simplement prévu des pansements,
Réagi plus spontanément, moins stocké d’mots sur l’bout de ma langue.
Questions et confidences, joies, peines, et déceptions,
Frustrations, b’soins d’assistance, malaises, désillusions,
S’installent et moisissent nos armoires, s’étalent et tapissent nos parois.
Jusqu’à c’qu’on les fasse sortir, mais par flemme on les ignore,
C’est quand on les croit oubliés qu’la flamme prend et qu’ils r’sortent.
J’ai pas fait l’effort de voir c’qui flottait dans les silences,
Et encore moins de laisser voir ce dont je taisais l’existence.
K1000:
Les années passent et pèsent, laissent une mélasse épaisse,
Certains l'étalent, d'autres les masquent et serrent les masséters.
Tracas, chagrin, agressivité,
Effroi, dédain, culpabilité,
Les douleurs s'expriment sous différentes formes.
Celui qui veut les faire taire, souvent les renforce.
Parfois imperceptibles sont les fusées de détresse.
Les affres se déterrent et nous détériorent
De l'intérieur, on se déteste ou s'en prend à l'autre.
On aimerait se sentir libre mais l'on sent la corde.
Bienvenue dans l'insondable psyché,
Là où tout est opaque et le cœur asséché.
Ce n'est que jeu de miroirs, ça paraît insoluble,
Si bien que même les proches sont de parfaits inconnus.
On lègue en héritage ce cadeau empoisonné,
Ce puzzle insaisissable, capable d'emprisonner.
Regarde les familles se déchirent sans se comprendre,
Et même quand tout va, rien ne va, mais bon sang,
Le non-dit s'accumule, espérant que ça suture
Et nos progénitures en sont la sculpture.
Ça suppure, ça suppute, sans trouver repos,
On opère les maux sans connaître les causes.
Voilà comment nos enfants naissent éclopés,
Portant les peines que nous n'avons su écoper.